• Lisez aussi : La NASA révèle toutes les premières images du télescope spatial le plus puissant de James Webb • Lisez aussi : La première image du télescope James Webb révèle un très jeune univers Surnommée “Black Beauty”, NWA 7034 fascine les géologues depuis sa découverte dans le Sahara en 2011. Ce bloc, facile à tenir en main et pesant un peu plus de 300 grammes avant coupe, est “la plus vieille roche que nous ayons, soit sur Mars ou presque sur Terre”, a déclaré à l’AFP le planétologue Sylvain Bouley, co-auteur de l’étude publiée dans Nature Communications. Il contient du zircon, un type de minéral vieux de 4,48 milliards d’années. Soit “environ 80 millions d’années après le début de la formation des planètes” du système solaire, précise M. Bouley, professeur au Laboratoire de géosciences de l’université Paris-Saclay. NWA 7034 est donc un “livre ouvert sur les premiers jours de Mars”, lorsque la surface du magma a commencé à se solidifier. Alors que nous avons “perdu cette histoire primitive de notre Terre”, où la majorité des sols originels ont disparu, dans le grand remodelage de la tectonique des plaques – un phénomène qui a largement épargné Mars. L’équipe de chercheurs, dirigée par des planétologues de l’université australienne Curtin à Perth, avec une forte contribution des institutions françaises, a réussi à déterminer l’origine exacte de la météorite, dans une région qui abrite une croûte très primitive de la planète rouge. Il devait identifier un cratère, formé par l’impact d’une météorite venue de l’espace avec “suffisamment de force pour éjecter les roches à très grande vitesse, plus de 5 km/s, pour échapper à la gravité martienne”, explique-t-il à l’AFP Anthony Lagain. scientifique planétaire à l’Université Curtin et premier auteur de l’étude. Ces cratères doivent avoir au moins 3 km de diamètre. Problème, Mars en compte environ 80 000 au moins de cette taille. Deuxième indice, les chercheurs savaient que NWA 7034 avait été éjectée dans l’espace il y a environ cinq millions d’années, grâce à la mesure de son exposition aux rayons cosmiques. 90 millions de photos de cratères “Nous recherchions donc un très jeune et grand cratère”, explique à l’AFP Anthony Lagain, dont la thèse de doctorat portait notamment sur la datation des cratères martiens. Autre indice, l’analyse de la composition de “Black Beauty” a révélé qu’elle avait été brutalement chauffée il y a 1,5 milliard d’années, probablement par un impact d’astéroïde. En d’autres termes, la roche a d’abord été retirée de la surface avant de tomber plus loin, où un autre impact l’a cette fois projetée dans l’espace, jusqu’à la Terre. Fort de ces informations, Anthony Lagain a amélioré un algorithme de détection de cratère développé à Curtin. Avant de lui faire broyer avec un supercalculateur la mosaïque de 90 millions de photos de cratères martiens, accumulées grâce à la caméra d’un satellite de la NASA. Le résultat a réduit la sélection à 19 stands, puis à un seul, Karratha. Ce cratère de 10 km de diamètre se trouve dans “une très ancienne région de l’hémisphère sud riche en potassium et en thorium, comme Black Beauty”, explique M. Lagain. Argument final, la météorite est la seule des martiens à être fortement magnétisée, mais “la zone où se trouve Karratha est la plus magnétisée de Mars”. Répartie sur les régions de Terra Cimmeria et Sirenum, cette région est “probablement une relique de la plus ancienne croûte de Mars”, selon l’étude. Qui supplie l’envoi d’une expédition consacrée à l’étude de sa géologie. Le professeur Bouley pointe du doigt une sorte de “parti pris” qui a focalisé les missions martiennes sur la recherche de signes d’eau et de vie, au détriment des époques antérieures qui auraient pu leur permettre d’apparaître. De plus, après sa découverte, NWA 7034 avait fait la une des journaux en raison de la présence d’eau à l’intérieur. Mais comprendre la formation des premières croûtes planétaires, c’est comprendre ce qui s’est passé au début, rappelle M. Lagain, et “comment on arrive sur une planète aussi extraordinaire que la Terre dans l’Univers”.