Une redite un peu folle pour un site inédit de la Grande Boucle. Plus incroyable encore, la Haute-Saône n’avait jamais accueilli d’arrivée d’étape. “70” a longtemps été le grand oublié du Tour. Parfois, il avait vu les coureurs traverser les rues de son quartier. Ils y avaient même commencé, une seule fois, lors de l’étape Vesoul – Auxerre en 1972. Mais ils n’ont jamais fini. Jusqu’à la Planche des Belles Filles, dont la réputation n’est plus à faire. La Planche et le Tour c’est aussi un mariage d’amour et de logique. Les organisateurs sont tombés sous le charme de cette ascension. Son site Internet. Son nom aussi. “C’est un nom incroyables’enthousiasme Christian Prudhomme en 2020 dans ses colonnes L’Est républicain. C’est audible, même pour les étrangers« L’endroit est aussi plein d’histoires et d’histoire. Celle des jeunes filles de La Planche, qui se sont enfuies au sommet de la montagne. Celui des maquisards, également pendant la Seconde Guerre mondiale, un célèbre maquis. Le Tour de France Le profil, les horaires, la carte : Tout ce qu’il faut savoir sur la 7ème étape IL Y A 13 HEURES Bien avant que le Tour ne s’y intéresse, les locaux n’ignoraient pas son potentiel sportif. La Planche est alors le point culminant de la cyclosporique Les Trois Ballons. A la lecture des commentaires des participants, le chef de tournée, ravi, allait demander à la fin des années 2000 à Yves Krattinger, le président du conseil départemental. “Qu’est-ce que la Planche des Belles Filles ? Il semble difficile.” “Si tu veux, c’est la prochaine arrivée du Tour“, a répondu ce dernier. Le profil Stage 7 : une super planche à ne pas manquer Mais la grande fortune de La Planche était d’être située au cœur des Vosges. La même ascension dans les Pyrénées ou les Alpes n’aurait probablement pas tourné de la même manière. Depuis sa prise de fonction en 2007, Christian Prudhomme a une double obsession, l’une liée à l’autre : découvrir de nouveaux lieux et se ressourcer au passage. Pour cela, il souhaite s’orienter davantage vers des volumes intermédiaires. Mais les Voges sont abandonnées. Ils ne proposent plus de circuits suffisamment sélectifs pour le cyclisme moderne comme le vénérable Ballon d’Alsace, étape mythique du Tour de France, mais ils ne sont plus empruntés. La découverte de la Planche tombe donc à point nommé. Au bon endroit au bon moment.

Un énorme défi logistique

Le 7 juillet 2012, le Tour et la France entière découvrent cette ascension courte mais extrêmement sélective : 5,9 kilomètres avec une pente moyenne de 8,5 %. Le défi était énorme. La petite gare des Vosges n’était pas adaptée à l’arrivée du barnum de la Grande Boucle. Son peloton bien sûr, mais aussi tous les fans, les dizaines de véhicules, sans oublier la caravane. Jean-Louis Pagès est alors le directeur du lieu (départ et arrivée) du tour. Au Bistrot Vélo, sur Eurosport, il a rappelé cette semaine la nature et l’ampleur du challenge : “La Planche des Belles Filles est une belle trouvaille. Christian avait sa logique sportive de moyenne montagne, ce qui est parfaitement légitime, sauf que quand il m’a envoyé là-bas, il y avait un tout petit plateau, une petite plate-forme et… rien après ça“Même ainsi, le potentiel est là.”Cette plateforme, à mon avis, pourrait accueillir les médias de la tournée à condition d’y mettre de la vaisselle pour la stabiliser un peu. Ensuite, nous avons créé une rampe d’asphalte d’environ 500 mètres“, il explique. “La Planche des Belles Filles, une merveilleuse découverte” Le projet de développement coûteux poussera les écologistes et une partie de la population à crier et à intenter une action en justice, en vain. Sportivement en revanche, le succès sera incontestable. Dès cette édition 2012, le conseil d’administration des Belles Filles a imposé ses deux atouts qui ne se sont jamais démentis depuis : son côté spectaculaire et son poids dans la course. En 2012, l’ère Sky a véritablement commencé ici. Chris Froome s’y est imposé devant son leader, Bradley Wiggins, qui portait le maillot jaune et ne l’a plus lâché jusqu’à Paris. La Plance avait son acte de naissance.

Il a atteint la beauté des forêts bosgiennes

Une image frappe. Celle des coureurs qui semblent surgir d’un coup à la hauteur de la pente. Avant d’être une image, c’était une vision. Celle de Jean-Louis Pagès, qui l’avait en tête en avant-première lors de sa première visite virtuelle du site : “J’ai “vu” le coureur de nulle part. D’abord son casque, sa tête, son torse. Il a atteint la beauté des forêts bosgiennes. Je l’ai vu avant tout le monde, même si je ne suis pas un expert. Et c’est arrivé. C’est un très beau souvenir.” La première tentative s’est transformée en un coup majeur. Pour tout le monde, une certitude : la tournée reviendra. Henri Terreaux, senior manager de la logistique chez Orange, avait lui aussi vécu venir à La Planche comme un challenge. “Ce que je demande à Christian, c’est si dans son esprit il a l’intention de revenir quelque part à moyen terme, nous a-t-il dit il y a quelques années. Dans ce cas, sur un site complexe comme Board, on fera en sorte de sortir la fibre par exemple. C’est un investissement. Quand on met 15 à 20 km de fibre, ce n’est pas négligeable. Si je sais que le Tour veut revenir, je les laisse.” En 2012, il interroge donc Prudhomme sur le Board. Réponse du patron : “Pas à moyen terme. Nous reviendrons très bientôt.” Christian Prudhomme promet dans un premier temps à Yves Krattinger de ramener le Tour à La Planche dans cinq à six ans. Il n’en faudra que deux. En 2014, Vincenzo Nibali signe un coup double. Il s’est imposé devant Thibaut Pinot, le country boy, pour reprendre le maillot jaune. Comme Wiggins, il tiendra le coup jusqu’au bout. Une petite légende est née, comparable à celle de l’Alpe d’Huez autrefois : avec du jaune à La Planche, avec du jaune à Paris. Dans les cinq premières passes, cela a toujours été le cas, sauf en 2019.”Il raconte en partie, et en fait dans une large mesure, la vérité de la tournée», confiait Prudhomme lors de l’introduction de la promotion 2022 l’automne dernier. La palette RP : « 600 mètres de gravillons » vont briller à la Super Planche des Belles Filles

2020, la page de l’histoire

En dix ans, le conseil s’est installé. Forcé, même. Le succès initial s’est concrétisé et les organisateurs ont su réinventer son usage, malgré sa jeunesse. En 2019 c’était le passage au “Super Board”, qu’il reprendra vendredi. Ajout d’un kilomètre extrêmement raide (jusqu’à 24% au point le plus raide) sur un parcours bondé et non pavé. Par rapport aux arrivées précédentes, la montée augmente à 7 kilomètres en moyenne de 8,7%. L’année prochaine, nouvelle innovation. Deux pour le prix d’un, même. Pour la première fois, la planche est utilisée comme point culminant d’un contre-la-montre. Et ceci est placé la veille de l’arrivée. Jusqu’alors La Planche, comme elle le sera cette année, était plutôt servie en apéritif sur la montagne, comme le premier sommet faisant office de détonateur. Dès 2014, Jean-François Pescheux, alors directeur de course du Tour, avait émis l’hypothèse : “Ce serait un excellent endroit pour s’arrêter la veille d’arriver à Paris, en tant que juge de paix.” Pour dire le moins, il avait mis le doigt sur la tête. Le samedi 9 septembre 2020, La Planche a connu un revirement sensationnel lorsque le jeune Tadej Pogacar a renversé son compatriote slovène Primoz Roglic pour survoler le chrono et s’emparer du maillot jaune à 24 heures de Paris. La Planche des Belles Filles, indéniablement née, détient le dernier élément de sa légende naissante : une page de l’histoire de la tournée. A dix ans, tu n’es pas encore assez vieux pour être une légende. Ces rumeurs s’accumulent avec le temps. Mais il est tout de même impressionnant de voir le chemin parcouru en si peu de temps depuis cette ascension inconnue du plus grand nombre il n’y a pas si longtemps. A défaut d’être tout à fait digne du Galibier, du Ventoux, de l’Alpe d’Huez et de tant d’autres, c’est déjà La Planche. Séduisant et inégalé. Le Tour de France “C’est un nouveau Tour qui commence” : Gaudu – Bardet, jusqu’ici tout va bien IL Y A 16 HEURES Le Tour de France La palette RP : « 600 mètres de gravillons » vont briller à la Super Planche des Belles Filles IL Y A 16 HEURES