Une première image a été dévoilée en avant-première lundi soir à la Maison Blanche en présence du président américain Joe Biden. Il s’agit de l’image “deep web field”, l’image la plus profonde et la plus nette jamais prise de l’univers infrarouge lointain. Cette image montre l’amas de galaxies SMACS 0723 tel qu’il était il y a 4,6 milliards d’années, avec une multitude de galaxies de couleurs différentes, chacune avec des caractéristiques différentes. La masse combinée de toutes les galaxies de cet amas agit également comme une lentille gravitationnelle qui a permis de grossir et de mettre en évidence des galaxies beaucoup plus éloignées qui se sont formées il y a moins d’un milliard d’années. Le Big Bang, qui aurait eu lieu il y a environ 13,5 milliards d’années.
Voir l’invisible
“En travaillant dans l’infrarouge, le télescope James Webb permet de voir plus loin dans l’Univers que le télescope Hubble. Par un phénomène similaire à celui de l’effet Doppler (qui fait varier la fréquence du son émis par un train, par exemple, selon qu’il s’approche ou s’éloigne), la longueur d’onde de la lumière nous venant de galaxies lointaines – qui sont s’éloigne de nous de plus en plus vite en raison de l’expansion de l’Univers – il est étiré et il en va de même dans l’infrarouge. Pour Hubble, qui regarde surtout dans le visible, ces objets sont devenus invisibles. Avec Webb, on peut donc remonter plus loin dans le temps. On devrait pouvoir remonter quelques centaines de millions d’années après le Big Bang », explique Erick Dupuis, directeur du développement de l’exploration spatiale à l’Agence spatiale canadienne. Le deuxième cliché qui nous a été dévoilé mardi est vraisemblablement celui du spectre de l’atmosphère de l’exoplanète WASP-96 b située à 1150 années-lumière et en orbite autour d’une étoile semblable au Soleil. Pour ce faire, l’instrument canadien NIRISS (Near Infrared Slitless Imager and Spectrograph) a capturé le spectre de la lumière de l’étoile traversant le petit anneau d’atmosphère entourant l’exoplanète lorsqu’elle passait devant son étoile. Le spectre résultant contient la signature spectrale de toutes les molécules présentes dans l’atmosphère de la planète. Pourtant, l’analyse du spectre de WASP-96 b “a confirmé sans équivoque la présence de molécules d’eau dans l’atmosphère” de cette géante gazeuse d’une taille légèrement supérieure à Jupiter et d’une masse se rapprochant de celle de Saturne. “Ce spectre, qui est le plus détaillé jamais obtenu d’une exoplanète, démontre la capacité de Webb non seulement à détecter des exoplanètes, mais aussi à déterminer la composition chimique de leurs atmosphères”, s’enthousiasme le chercheur principal René Doyon des organismes canadiens. NIRISS et FGS (détecteur de guidage de précision).
Nébuleuse de l’anneau sud
La troisième image montre deux clichés de la nébuleuse de l’anneau austral, l’un pris dans le proche infrarouge, à gauche, et l’autre, dans le moyen infrarouge, à droite. A une distance de 2500 années-lumière de nous, cette nébuleuse est le théâtre des dernières étapes de la vie d’une étoile, qui apparaît sous la forme d’un petit point rouge au centre de l’image de droite. « Le moyen infrarouge (à droite) nous a permis de distinguer deux étoiles au cœur de la nébuleuse : une étoile plus rouge qui venait de mourir et qui, en mourant, a créé cette nébuleuse dite planétaire. Juste à côté, une autre étoile, blanche sur le côté, est toujours vivante et est également visible et brillante au centre de l’image de gauche. Cependant, l’étoile rouge est presque invisible sur l’image de gauche car elle est entourée de poussière. Il fallait aller encore plus loin dans l’infrarouge moyen pour le voir derrière la poussière cosmique qui l’enveloppe », explique Nathalie Ouellette, responsable des communications scientifiques chez Webb au Canada et coordonnatrice de l’Institut de recherche sur les exoplanètes de l’Université de Montréal.
Stéphan Quintette
De son côté, la quatrième image dépeint principalement les violentes interactions gravitationnelles qui ont lieu entre quatre galaxies du Quintette de Stephan, qui comprend cinq galaxies, dont deux sont sur le point de fusionner dans le nuage de droite. “Le télescope Webb nous permet de voir comment les collisions entre galaxies provoquent la naissance de nouvelles étoiles dans chacune d’elles”, souligne Mme Ouellette, tout en précisant que les ondes de choc de ces cataclysmes sont ce qui condense les gaz des galaxies en nova. étoiles. Webb a également fait allusion à la présence d’un trou noir supermassif dans la plus haute galaxie de l’image. “Si on zoome sur cette galaxie, on peut voir des jets énergétiques sortir du trou noir et cela nous dit qu’il est très actif”, explique l’astrophysicien. Grâce au niveau de détail sans précédent fourni par Webb, il sera possible pour les scientifiques de déterminer la vitesse à laquelle les trous noirs se développent.
pépinière d’étoiles
Dans le dernier paysage cosmique à couper le souffle, nous découvrons cette fois une pépinière d’étoiles nommée NGC 33245 située dans la nébuleuse de la Carène. “La puissance du télescope Webb nous permet ici de voir le début de la naissance de certaines étoiles. La naissance est une étape de la vie d’une étoile qui dure très peu de temps, quelques millions d’années seulement, et il est techniquement difficile d’observer une telle étape car l’étoile est alors complètement entourée de poussière. Mais grâce à la lumière infrarouge, Webb pénètre dans cette poussière, ce qui nous permet de voir la naissance d’étoiles jusqu’alors impossible à observer », explique Mme Ouellette. « Toutes ces images ont été obtenues après seulement 120 heures d’observation lors d’un programme de démonstration spécifique. Ce n’est que le début de ce que Webb va nous révéler… » souligne René Doyon. La mission du télescope spatial entre maintenant dans sa phase opérationnelle et scientifique.