L’avenir du gouvernement de Mario Draghi est scellé après la décision du Mouvement 5 étoiles (M5S), membre de la coalition au pouvoir, de boycotter le vote de confiance à un texte discuté jeudi au Sénat. Le président du Conseil des ministres italien a ainsi annoncé qu’il démissionnerait jeudi après-midi. “Je veux vous annoncer que ce soir je remettrai ma démission au président de la République”, a déclaré Sergio Mattarella, selon des propos cités dans un communiqué de ses services. Selon l’annonce faite la veille par Giuseppe Conte, prédécesseur de Mario Draghi et actuel patron du M5S, les sénateurs de son parti n’ont pas participé au vote de confiance demandé par l’exécutif à l’occasion d’un décret contenant des mesures d’environ 23 milliards d’euros pour aider les familles et les entreprises face à l’inflation. Lisez aussi: Le Parlement italien soutient Draghi sur l’Ukraine malgré la scission du M5S Mario Draghi avait la majorité pour gouverner même sans les 5 étoiles, mais l’ancien patron de la Banque centrale européenne a confirmé à plusieurs reprises qu’il n’y aurait pas de gouvernement sans eux. Il était en effet venu à l’opération début 2021 pour former une coalition “d’union nationale” capable de surmonter l’urgence pandémique et la crise économique qui en découle. Cependant, sans le soutien du M5S, il voit son gouvernement devenir « politique » et estime qu’il n’est pas mandaté pour diriger un cabinet de cette nature. “Il semble pour le moment qu’il n’ait pas l’intention de retourner au Parlement pour voir s’il a une autre majorité”, a déclaré plus tôt à l’AFP Franco Pavoncello, professeur de sciences politiques à l’université américaine de Rome John Cabot. A lire aussiEn Italie, vers la fin de l’état de grâce pour Mario Draghi L’histoire est italienne, et donc compliquée : le décret législatif au centre de la crise politique contient aussi une mesure pour faciliter la construction d’un incinérateur d’ordures à Rome, à laquelle le M5S s’oppose. “Nous devons répondre aux troubles sociaux croissants de manière claire et décisive. Les irresponsables, ce n’est pas nous, ce sont eux qui ne donnent pas de réponse au pays”, a justifié Mariolina Castellone, cheffe des sénateurs du M5S. “Aujourd’hui, nous ne participons pas au vote de ce décret législatif car nous ne partageons aucune de ses dispositions”, celle concernant l’incinérateur de Rome, ni le mode” de son adoption, a-t-il ajouté. Le M5S s’oppose aux incinérateurs qui, selon eux, sont chers, polluants, inefficaces et n’incitent pas la population à trier les déchets. Ils appellent également à la mise en place d’un salaire minimum et du revenu du citoyen.
Chute de la bourse à Milan
Mais le mouvement est aussi, sinon principalement, à motivation électorale, selon les analystes. “Le M5S s’effondre dans les sondages et a besoin de retrouver de la visibilité (…). Il veut être au centre de l’attention”, a déclaré à l’AFP Lorenzo Codogoni, ancien économiste en chef au ministère italien des Finances et professeur invité à la London School of Economics. Le M5S, vainqueur des dernières élections législatives, en 2018, avec 32% des suffrages et une majorité relative au Parlement, n’a depuis cessé de chuter dans les intentions de vote, aujourd’hui à 10%-11% et le nombre d’élus a depuis gauche. Un tiers de ses députés, environ 50, ont fait défection et ont suivi l’ancien chef du M5S, l’actuel ministre des Affaires étrangères Luigi Di Maio, qui a récemment formé son propre parti, Ensemble pour l’avenir (IPF). Ces turbulences n’ont pas manqué d’agiter les marchés : la Bourse de Milan a chuté de plus de 3 % jeudi après-midi et le coût de la dette italienne a de nouveau augmenté, signe de la nervosité de l’environnement.
Évitez les campagnes et les élections
Lorenzo Codogno estime que la solution pourrait être un éventuel gouvernement “Draghi bis” ou avec un autre Premier ministre pour gérer la situation actuelle et conduire le pays aux élections législatives début 2023, car le président de la République, Sergio Mattarella, ne non il veut des élections en septembre. Le chef de l’Etat entend éviter une longue campagne et voter au moment où le pays fait face aux conséquences de l’attaque russe contre l’Ukraine, face à une nouvelle vague de Covid, doit préparer le budget 2023 et mettre en œuvre toutes les mesures demandées par le l’Union européenne de bénéficier des quelque 200 milliards d’euros accordés à Rome dans le cadre du système de l’UE.