C’est ainsi que le ministre de l’Economie Bruno Le Maire s’est exprimé lors des Rencontres économiques qui se sont tenues ce week-end à Aix-en-Provence. Une réponse aux patrons – grands groupes comme petites entreprises – qui se sont tous plaints d’avoir du mal à recruter… Quel que soit le secteur d’activité, dans l’aérospatial, les transports, le tourisme ou l’hôtellerie – focus, ils affirment tous être limités à leurs activités à cause de ces problèmes de personnel. Les restaurants ferment tôt, faute de personnel, les commandes ne peuvent pas être honorées… etc. Et tandis qu’Emmanuel Macron reçoit, ce lundi, à Versailles, des patrons étrangers dans le cadre de l’opération “Choose France”, “comment attirer des investissements en France si on ne peut pas avoir les ressources humaines et les compétences ? », s’inquiète un ministre. Pas question de limiter l’attractivité de la France.
Allez vite, depuis le début
Face à cette situation, plusieurs membres de l’exécutif ont promis de traiter le dossier à la rentrée. Une des solutions, selon le gouvernement, serait de commencer très rapidement à réformer l’assurance-chômage. Promise par Emmanuel Macron lors de sa campagne, cette réforme aura pour objectif d’aller un cran plus loin que ce qui avait déjà été fait lors du premier quinquennat. Sur le papier, cet acte 2 devrait façonner la rémunération en fonction de la situation financière. Plus la situation est mauvaise, plus le système d’indemnisation est généreux. Et vice versa, plus il s’améliore, moins le système verse de compensations. Avec une croissance qui ralentit, mais un taux d’emploi qui demeure élevé, le gouvernement ferait bien de ne pas trop en attendre. La réforme permettrait également, selon diverses sources, de durcir certaines règles qui peuvent inciter les travailleurs à profiter indûment des allocations et à rester au chômage. “Il y a beaucoup d’angles morts, de zones grises dans le système, qui ne favorisent pas un retour à l’emploi”, plaide une personne bien informée proche de l’exécutif. Exemple : “lorsque vous quittez votre travail du jour au lendemain, sans faire signe à votre employeur, vous pouvez toucher une indemnité”, détaille-t-il. En augmentant un peu plus certaines règles d’indemnisation, le gouvernement espère donc inciter les travailleurs à retourner au travail plus rapidement. Surtout, ça promet d’aller vite. “Cette réforme de l’assurance-chômage pourrait se faire dès la rentrée, avant les retraites…”, juge le lourd du gouvernement. Sans compter qu’Elisabeth Borne n’aurait aucun mal à gérer ce dossier très technique qu’elle connaît sur le bout des doigts. C’est elle, en tant que ministre du Travail, qui a géré la dernière réforme l’an dernier. Enfin, il y a une petite fenêtre d’opportunité calendaire : le contrat d’assurance-chômage expire le 31 octobre prochain… Il faut donc trancher. Par conséquent, le gouvernement peut choisir de conserver les mêmes règles ou de les modifier.
Les syndicats étaient contre, mais l’opinion publique est plus favorable
Et tant pis si les syndicats sont contre. De la CFE-CGC à la CFDT, en passant par la CGT, ils se sont tous battus contre la dernière réforme et il y a peu de chance qu’ils aient changé d’avis. Interrogé par France Info, ce lundi matin, Philippe Martinez, le chef de file de la CGT, a exprimé son regret « que le gouvernement pense encore qu’il suffit de durcir le dispositif pour que les demandeurs d’emploi puissent trouver du travail. c’est un peu plus compliqué que ça. » Et le syndicaliste de Montreuil a souligné qu’à peine un chômeur sur deux était indemnisé. Autrement dit, personne n’est au chômage par plaisir ou par intérêt. Le gouvernement sait cependant que dans l’opinion publique l’opposition est beaucoup plus divisée. Aucune réforme de l’assurance-chômage n’a fait descendre les foules dans la rue. Pour convaincre les réticents, le gouvernement entend présenter cette réforme comme une solution pour lutter contre la hausse des prix. Quand on travaille, on a de meilleurs revenus et c’est le meilleur moyen de maintenir le pouvoir d’achat des ménages, en période d’inflation”, rappelle un consultant. Enfin, politiquement, ce débat sur la priorisation du travail séduira les républicains. Alors que le gouvernement cherche des alliés à l’Assemblée nationale, cela peut être une façon de rallier certains élus de droite voire d’extrême droite.
Trouver des marges budgétaires
En réformant l’assurance-chômage, l’exécutif espère aussi retrouver une marge de manœuvre budgétaire. Emmanuel Macron s’est engagé à atteindre le plein emploi, c’est-à-dire un taux de chômage d’environ 5 %… d’ici cinq ans. L’enjeu est d’autant plus important qu’à travers le plein emploi l’exécutif entend trouver des sources de financement pour investir dans l’école, la transition écologique, la santé… Bien plus que la réduction des coûts. Dernier argument selon lequel l’exécutif ne procède pas au grand jour mais dans la tête, cette réforme serait aussi un signe envoyé à Bruxelles. Un gage de la capacité de la France à poursuivre sa transformation.