Plus de 28 ans après l’extermination des Tutsi au Rwanda, l’ancien préfet du Rwanda a été condamné mardi 12 juillet par le tribunal correctionnel de Paris à vingt ans de prison pour complicité de génocide.
Laurent Bucyibaruta, 78 ans, qui s’est présenté libre, a quitté la salle accompagné des gendarmes, appuyé sur sa canne. Il a eu le temps, avant cela, de discuter avec ses avocats et son proche, sur un banc. Derrière lui, on entendait les sanglots de ses partisans, rapporte l’envoyée spéciale au Tribunal de Paris, Amélie Tulet. L’ancien haut fonctionnaire a été reconnu coupable d’être « complice de génocide » et « complice de crimes contre l’humanité ». Ces accusations concernent les tueries commises à l’école technique de Murambi, la paroisse de Cyanika, la paroisse de Kaduha, l’école Marie-Merci notamment, ainsi que les barrages routiers de la province de Gikongoro dont il était le préfet. Le parquet avait requis la prison à vie vendredi. Toutefois, Laurent Bucyibaruta a été acquitté des charges de génocide et de crimes contre l’humanité en tant qu’auteur, notamment pour les actes commis à la prison de Gikongoro et à la paroisse de Kibeho. Pour ce dernier massacre, qui s’est produit au début du génocide, le tribunal a considéré qu’il n’avait aucune information sur son niveau de connaissance de l’étendue du travail génocidaire à l’époque. Une énorme déception pour les parties civiles car 40 000 personnes sont mortes sur ce site. Mais “ce soir, Laurent Bouchibarouta est en prison, là où il aurait dû être depuis 20 ans”, a déclaré l’un d’eux. Sa défense avait demandé lundi 11 juillet l’acquittement, appelant le tribunal correctionnel de Paris à “choisir le courage”. Dans ses derniers mots au juge et au jury avant qu’ils ne se retirent pour délibérer, l’ancien haut fonctionnaire a voulu s’adresser aux “rescapés du génocide”. “Je voudrais leur dire qu’il ne m’est jamais venu à l’esprit de les abandonner aux tueurs”, a déclaré Laurent Bukibaruta, vêtu d’une veste beige sur une chemise bleue, un masque chirurgical sous le menton. « Est-ce par manque de courage ? Pourrais-je les sauver ? Ce sont des questions, voire des regrets qui me hantent depuis plus de 28 ans”, a poursuivi l’accusé, qui vit en France depuis 1997. En procès depuis le 9 mai, il a toujours contesté les charges.