Lors de sa visite en Arabie saoudite vendredi 15 juillet, le président américain Joe Biden a mis Riyad en garde contre des “représailles” en cas de nouvelles attaques contre des dissidents, après avoir rencontré le prince héritier Mohammed bin Salman, considéré par Washington comme un commanditaire du meurtre du journaliste Jamal Khashoggi. Air Force One a atterri à Jeddah, dans l’ouest de l’Arabie saoudite, après un vol direct depuis Israël, pour la première fois alors que Washington cherche à normaliser les relations entre ses deux partenaires les plus importants au Moyen-Orient. Joe Biden a été accueilli au palais royal de Djeddah par Mohammed ben Salmane, surnommé “MBS”, faisant un coup de poing avec le jeune dirigeant de facto du royaume saoudien, 36 ans. A Djeddah, Joe Biden a également rencontré le roi Salmane, malade et âgé de 86 ans, avant un “sommet de travail” dirigé par le prince Mohammed, essentiel sur tout, du pétrole à l’armée. La rencontre entre M. Biden et bin Salman sont le clou de cette tournée au Moyen-Orient alors que Washington tente de convaincre le royaume d’ouvrir les vannes à sa production pétrolière. Le défi : faire baisser le prix du gallon d’essence à l’approche des élections de mi-mandat aux États-Unis. Lire aussi : L’article est destiné à nos abonnés Pétrole : l’Opep et son allié russe décident d’ouvrir un peu les portes

“Réponse” américaine en cas de rechute

Mais alors qu’il était encore candidat, Joe Biden avait promis de traiter l’Arabie saoudite de “paria”, notamment à cause de l’assassinat en 2018 du journaliste et critique du régime saoudien Jamal Khashoggi.Une fois élu, il avait déclassifié un rapport accablant sur la responsabilité du prince dans ce meurtre. À Djeddah, Joe Biden a déclaré qu’il avait averti le prince héritier saoudien d’une “réponse” s’il y avait de nouvelles attaques contre des dissidents, qualifiant le meurtre de Khashoggi de “scandaleux”. “Je viens de préciser que si quelque chose comme ça se reproduit, ils auront cette réponse et plus encore”, a-t-il déclaré aux journalistes, affirmant avoir soulevé la question “au début” de la réunion avec MBS. Les autorités saoudiennes ont toujours nié la responsabilité directe du prince héritier dans cet assassinat. Lire aussi : Article destiné à nos abonnés Arabie Saoudite : Mohammed Ben Salman, la revanche des hors-la-loi

Un “chèque” controversé

La veuve du journaliste, Hatice Cengiz, a tweeté une capture d’écran du compte de son défunt mari : « Alors vous demandez des comptes à mes assassins comme ils l’ont promis ? “. “Le sang de la prochaine victime de MBS est sur vos mains”, a-t-il ajouté, accompagné d’une photo du “chèque” que M. Biden a remis au prince saoudien. La visite de Joe Biden a été largement critiquée par les militants des droits de l’homme, avec le puissant Gulf monarchie accusée de graves violations et d’une dure répression contre ses opposants. Le président américain Joe Biden et le prince héritier saoudien Mohammed Bin Salman s’entretiennent au palais royal d’Al-Salam à Djeddah, en Arabie saoudite, le 15 juillet 2022. BANDAR AL-JALOUD / AFP
Au-delà des questions de droits de l’homme, parmi les objectifs de la tournée de Joe Biden figurent les efforts visant à rapprocher les Saoudiens et les Israéliens. Lors de son allocution à Djeddah, Joe Biden a annoncé que les casques bleus internationaux, dont des troupes américaines, quitteraient Tiran, l’une des deux îles stratégiques, avec Sanafir, située en mer Rouge entre l’Égypte, Israël et l’Arabie saoudite. Le retrait de cette force, mise en place depuis quarante ans, doit avoir lieu “d’ici la fin de l’année”, a précisé la Maison Blanche dans un document, après qu’Israël a déclaré n’avoir “aucune objection” au transfert des deux îles égyptiennes vers la Arabie Saoudite. Dans le même temps, Riyad a annoncé l’ouverture de son espace aérien à “tous les transporteurs aériens”, y compris israéliens, une décision “historique” pour Joe Biden. À lire aussi : Joe Biden justifie son futur voyage en Arabie saoudite dans une tribune

Sommet arabo-américain

Ces deux initiatives pourraient, selon les analystes, ouvrir la voie à un possible rapprochement entre l’Arabie saoudite et Israël, pays qui normaliserait majoritairement ses relations en 2020 avec deux autres pays du Golfe : les Émirats arabes unis (EAU) et Bahreïn. L’annonce saoudienne a précédé le vol sans escale Tel Aviv-Djeddah sans précédent de M. Biden, le premier du genre entre Israël et l’Arabie saoudite qui ne reconnaît pas officiellement l’État juif. Son prédécesseur, Donald Trump, a volé dans la direction opposée de l’Arabie saoudite à Israël. Samedi, M. Biden assistera à un sommet des dirigeants des monarchies arabes du Golfe, rejoint par d’autres dirigeants arabes, qui ont commencé à arriver samedi après-midi. Une occasion de faire avancer la normalisation initiée par Israël avec plusieurs pays arabes, visant notamment à traiter avec l’Iran. Cependant, Riyad suppose d’établir des liens formels avec l’Etat hébreu en résolvant la question palestinienne, dénonçant régulièrement l’occupation et la colonisation des territoires palestiniens. Avant d’arriver en Arabie saoudite, Joe Biden a annoncé une aide de 100 millions de dollars à un réseau d’hôpitaux à Jérusalem-Est, le secteur palestinien de la ville sainte sous contrôle israélien. Il a ensuite rencontré le président palestinien Mahmoud Abbas à Bethléem, en Cisjordanie, territoire palestinien tenu par Israël. Lire aussi : Article destiné à nos abonnés Comment les États-Unis veulent renforcer leurs alliances au Moyen-Orient
Le monde avec l’AFP