ReportageEpisodes caniculaires de plus en plus fréquents, incendies toujours plus précoces… Dans la région de Marseille, les soldats du feu sont contraints de s’adapter aux conséquences du réchauffement climatique. Ils l’attendaient. Sans savoir quand il se déclarerait, mais avec cette certitude : il ne tarderait plus. Dans la région de Marseille, le premier grand incendie de l’été a ravagé près de 1 500 hectares dans le massif de la Montagnette, à la frontière du Vaucluse, probablement causé par les étincelles produites par le sabot de freinage défectueux d’un train de marchandises entre Tarascon et Graveson (Bouches-du-Rhône). Des sapeurs-pompiers mécaniciens commencent leur journée au Service départemental d’incendie et de secours des Bouches-du-Rhône, à Marseille, le 30 juin 2022. MATTHIEU ROSIER / VOST COLLECTIF POUR « LE MONDE »
Plus de mille pompiers y ont lutté dans un aride paysage de calcaire et de vallons couverts de garrigue hautement inflammable, de pinèdes, de champs d’amandiers et d’oliviers, entrecoupé de falaises abruptes. Depuis samedi, le feu est « fixé », mais l’état-major du service départemental d’incendie et de secours des Bouches-du-Rhône (SDIS 13) a prévenu : « L’opération sera longue. » D’autant qu’il faut aussi intervenir sur d’autres points chauds. Aux Pennes-Mirabeau, par exemple, où cinquante pompiers armant vingt engins ont été déployés, jeudi. Comme souvent dans ce secteur, le feu est parti en bordure de l’A55, l’« autoroute du littoral », qui file du quartier de la Joliette, à Marseille, vers Martigues, la « petite Venise » provençale. Végétation trop sèche et canicule persistante : dans les Bouches-du-Rhône, l’épisode météorologique en cours a ravivé les craintes d’une saison en enfer, entamée bien avant les grandes chaleurs de l’été. Les six premiers mois de l’année, le département a enregistré 641 départs de feu, dont 230 pour le seul mois de juin. « Du hors norme, on n’a jamais installé de dispositif préventif aussi tôt », assure le capitaine Stéphane Guyot, depuis le QG des pompiers, vaste complexe planté à quelques pas de la cité Bassens, dans le top 5 des points de deal des quartiers nord de Marseille. Véritable centre névralgique, la salle des opérations occupe un déroutant décor de science-fiction, où les opérateurs scrutent un gigantesque mur d’images qui fournit en direct un état des lieux de l’action sur le terrain. Le cas échéant, ces sentinelles bénéficient de l’avis de spécialistes issus d’autres services, agents forestiers ou du réseau de transport d’électricité. Le centre de traitement des appels, installé sur le même plateau technique, reçoit de 1 500 à 1 600 coups de fil quotidiens, tous géolocalisés, pour signaler un départ de feu, un accident, une fuite de gaz. Des sapeurs-pompiers discutent dans la salle du centre de commandement des opérations de secours, à Marseille le 30 juin 2022. MATTHIEU ROSIER / VOST COLLECTIF POUR « LE MONDE »

Le secours de technologies de pointe

« Ici, on a tout sauf les éruptions volcaniques », explique le lieutenant-colonel Frédéric Maggiani, chef du groupement opérations, d’un ton très « carré ». Outre le secours à la personne, qui mobilise 85 % des missions effectuées par les sapeurs-pompiers, le département des Bouches-du-Rhône offre un concentré de risques : vingt-cinq cours d’eau de plus de 10 kilomètres de long, des dizaines d’entreprises du secteur de la chimie attirées par la proximité du port de Marseille, un tissu urbain dense étiré le long de 400 kilomètres de linéaire côtier, des plans d’eau et des barrages, un terminal pétrolier à Fos-sur-Mer et un tunnel TGV aux Pennes-Mirabeau, sans compter un quart des communes situées en zone sismique moyenne. Il vous reste 68.55% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.