Des États-Unis et du Canada

Tout le monde s’accorde sur une remarque : de plus en plus de parents pratiquent une telle opération sur leur enfant, malgré le manque d’intérêt dans la plupart des cas. “Cela a probablement commencé aux États-Unis et au Canada, puis s’est propagé”, a déclaré Virginie Rigourd, pédiatre à l’hôpital Necker de Paris. Signe de sa popularité dans le monde anglophone, le nombre de frénotomies a quintuplé ces dix dernières années en Australie. Sans pouvoir donner des données aussi précises, les médecins français constatent que le mouvement séduit aussi les parents qu’ils voient en consultation. “Ce n’est pas quelque chose de nouveau, cela fait plusieurs années que cette folie s’est produite”, explique le Dr Rigurd. D’où vient cette idée pour les parents ? Selon le pédiatre, il y a généralement deux types d’acteurs impliqués, tous deux extérieurs au champ médical : les ostéopathes et les conseillers en allaitement. La plupart du temps, en effet, les parents demandent cette fonction pour faciliter l’allaitement, même s’il y a parfois d’autres pensées : éviter les défauts de prononciation, les problèmes digestifs…

Une réponse simple

La tendance à la phrénotomie s’inscrit dans le regain de popularité de l’allaitement ces dernières années, encouragé par les institutions de santé publique telles que l’Organisation mondiale de la santé (OMS). “Il y a un retour à l’allaitement (mais) il y a un manque de personnel bien formé pour pouvoir informer les mères, donc il y a une exacerbation des problèmes”, note Virginie Rigourd, citant en exemple les douleurs maternelles. Mais la phrénotomie est une réponse simple à des problèmes souvent complexes à traiter, contrairement à ce que prétendent de nombreuses conseillères en allaitement. « Perdre un frein de contention, c’est mettre en danger l’allaitement et la santé des bébés comme des mamans », explique une consultante en allaitement sur son site internet, proposant une formation en ligne sur le sujet pour une centaine d’euros. Or, c’est loin d’être le cas, selon une étude menée par Cochrane, une organisation très réputée dans le monde scientifique et qui rassemble de nombreux articles sur le même sujet en mettant régulièrement à jour ses conclusions.

“Toujours mieux couper”

“Aucune étude n’a pu démontrer que la frénotomie permet un allaitement réussi à long terme”, conclut la présente étude, qui souligne également la piètre qualité des études menées sur le sujet. Dès lors, l’intérêt de cette opération est loin d’être prouvé en cas de problème d’allaitement. Cependant, plus anormalement encore, certains parents sont invités à le faire alors qu’ils n’ont signalé aucun souci.