franceinfo : La situation est-elle critique ? Christiane Lambert : La situation est très grave et chaque jour qui passe, on voit les récoltes flétrir. J’ai fait le tour de mes champs cet après-midi, le maïs s’enroule, les épis ne se forment pas. C’est l’étape de fécondation. S’il n’y a pas de fertilisation, il n’y aura pas d’épi, donc il n’y aura pas de blé, et le rendement non plus. Et cela s’applique également aux pâturages, donc plus de nourriture pour les animaux. Et il y a même des prairies qui seront définitivement complètement mortes et qui repousseront. Sommes-nous en train de perdre des cultures ? Oui. Il y a aussi tout ce qui est raisin, fruit. La viticulture souffre des coups de chaleur, lorsqu’il fait 44 degrés, cela cuit les feuilles et peut abîmer les grappes. C’est ce qu’on appelle un souffleur. Il peut également prendre feu. Et pour le fruit, du côté exposé au soleil, c’est un coup de soleil qui provoque une sorte de résistance. Les fruits sont également perturbés. Les conditions climatiques obligent-elles les agriculteurs à changer leurs méthodes ? Beaucoup ont déjà changé en choisissant, lorsque c’était possible, des cultures de tournesol plutôt que de maïs, des variétés qui se sèment plus tôt pour être plus avancées et pour assurer le bon déroulement de la fertilisation. Nous avons commencé tout cela il y a cinq ou six ans. De Varenne de l’eau, nous avons trois succursales ouvertes. Un, le projet d’assurance, parce qu’il faut aider les agriculteurs à s’assurer et que la solidarité nationale joue au-delà des 50 % de perte. Deuxièmement, tout le travail d’accompagnement sur l’atténuation. C’est l’adaptation des pratiques et la recherche variétale pour des variétés plus résistantes. Et le troisième volet est la gestion de l’eau en pouvant aller plus vite vers le stockage de l’eau. Nous recevons tellement de pluies torrentielles en hiver que nous devons arrêter de les gaspiller. Les conséquences pourraient-elles être durables et pérennes, car l’alimentation des troupeaux repose aussi sur le fourrage ? Bien sûr. Les agriculteurs ont récolté leur fourrage de foin et le distribuent déjà à leurs animaux. Beaucoup comptent sur le maïs, en particulier les grains de maïs, pour fournir une alimentation riche en énergie à leurs vaches laitières, à leur bétail et à leurs porcs. Et ainsi nous aurons du maïs sans grain, un maïs qui a beaucoup moins de valeur. De nombreuses difficultés existent aussi dans les bâtiments d’élevage lorsqu’il fait 40 degrés comme dans les maternités. En ce moment, c’est le temps du bien. Il faut chronométrer la mise-bas pour qu’elle puisse avoir lieu entre 1h et 5h du matin quand il fait plus frais, sinon les truies ont très mal à la mise-bas. “Nous essayons de nous adapter du mieux que nous pouvons, mais c’est plus de travail et plus de stress.” Christiane Lambert, présidente de la FNSEA chez franceinfo Dans ce tableau très sombre, certaines cultures profitent-elles de ces conditions ? Lorsqu’il atteint 40 degrés, le fruit est magnifique, gorgé de soleil, mais il mûrit très vite. Alors il faut vraiment jouer la solidarité, acheter beaucoup de fruits français en ce moment. Les producteurs sont au travail pour les recevoir dans les meilleures conditions. Et nous comptons sur les consommateurs pour être là. Prends soin de toi. Mangez des melons, des abricots, des nectarines, des cerises, tous les fruits d’été. Les producteurs doivent les vendre très rapidement, car ils sont récoltés beaucoup plus rapidement que d’habitude.